Pour Fomovox, Phoebe Wilson publie Edi Dubien trouve refuge au musée de la Chasse et de la Nature mi décembre 2024.

Le Musée de la chasse et de la nature devient le nouvel habitat de l’oeuvre imaginative et vibrante de l’artiste Eli Dubien, ses créatures et animaux, avec l’exposition intitulée «S’éclairer sans fin ». Ce projet est tout à fait en phase avec l’ADN du musée et sa collection
permanente, mise en dialogue avec 200 dessins, peintures, sculptures et installations de l’artiste qui a été récemment exposé à la Biennale de Lyon.

La première salle de l’exposition plonge le spectateur dans un monde irréel et mystique avec ses murs ornés d’une multitude de dessins et de peintures à l’encre, au crayon et à l’aquarelle. Ils racontent diverses histoires de métamorphoses entre un jeune garçon, des
animaux et des plantes, ainsi que des représentations d’animaux personnifiés dotés de qualités ou d’habitudes humaines. La pièce est également ornée d’un papier peint à la main selon une sorte de vanité, représentant des crânes et des plantes réalisés par l’artiste lui-même. Le centre de la pièce est occupé par une sculpture en plâtre représentant un bateau échoué sur lequel un garçon pleure dans ses mains. Un liquide bleu ressemblant à de la cire sortant de ses yeux tombe sur le bateau et commence lentement à le remplir. Un nid d’oiseau fait de brindilles repose dans ses mains, au sommet duquel est perché un petit dinosaure, ainsi que divers animaux assis sur le bateau. Les larmes du garçon qui remplissent le bateau suggèrent qu’il est peut-être la cause de son propre désarroi. Par exemple, ses choix futurs contribuant au changement climatique peuvent affecter ses amis. Cette idée est accentuée par la présence d’un animal, le dinosaure, aujourd’hui disparu.

Cette sculpture est très évocatrice dans la pièce qui est par ailleurs pleine d’espoir avec ses représentations imaginatives du garçon ne faisant qu’un avec les animaux et la nature, avec des poumons faits de plantes et autres empreintes d’animaux visibles dans d’autres peintures. Mais l’utilisation abondante de variétés de bleu ajoute un ton nostalgique, comme s’il s’agissait d’un point de vue d’adulte décrivant l’imagination insouciante et débordante de l’enfance.

Les étages supérieurs abritent la collection de meubles anciens du musée et toutes sortes d’animaux taxidermisés qui ont été suspendus dans le temps. Cette exposition permet à l’exquise richesse et à l’histoire de cet espace de devenir un labyrinthe pour un jeu d’enfant : une chasse au trésor. Le visiteur s’élance à la recherche des œuvres d’Eli Dubien qui ont été disséminées, ajoutant sa touche de fantaisie, comme par exemple l’un des sangliers du musée portant un tutu rose vif.

Toutes les pièces deviennent un lieu de découverte et d’émerveillement enfantin où les sculptures et les installations d’Eli Dubien interagissent avec l’espace si singulier du musée et d’autres œuvres d’artistes, des hôtes silencieux mais agissant. Des sculptures en plâtre d’un jeune garçon hybride avec des animaux reposent sur le sol de différentes salles. Elles attirent immédiatement le regard du visiteur et lui permettent d’envisager une possible réconciliation des règnes et des espèces.

La cohabitation entre les oeuvres d’Eli Dubien et les créatures de la collection du musée est inattendue, mais elles se complètent dans la représentation des animaux et de la faune. La nature ludique de l’exposition et ses notes tantôt comiques tantôt fragiles, laisse place à une certaine dérive mélancolique. La représentation récurrente de jeunes garçons aux multiples visages illustre la fantaisie avec laquelle nous pouvons choisir de percevoir le monde qui nous entoure et son caractère transitoire. Nous quittons cette exposition avec l’espoir de retrouver l’enfant qui sommeille en chacun de nous et une capacité d’émerveillement sans fin.

Commissaire : Remy Provendier-Commenne, responsable des collections du musée de la Chasse
Avec le soutien de la galerie Alain Gutharc

Crédit Photo : Aurélien Molle